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Qu’est-ce qui pousse les nouveaux nomades à vivre sur la route

 

            L’Homme, qui à l’origine était nomade et se déplaçait pour survivre, est devenu peu à peu sédentaire. Pourtant, aujourd’hui encore, des personnes choisissent de vivre dans des habitats mobiles ou éphémères. Cette forme d’habitation n’est certes pas une nouveauté, mais si les motivations et le type d’habitat diffèrent, ce phénomène semble être de plus en plus répandu.

           Ce mode de vie, apparu dans les années 60-70, serait né du mouvement hippie d’après Frank Michel (doc 1) et Anick Delorme (doc 8). Aujourd’hui il serait plutôt lié à des contraintes économiques ou des idéologies comme l’explique Marcello Frediani (doc 3-4) ou Agnus Christophe (doc 6).  Deux reportages (Infrarouge doc 2 et 66 minutes doc  5) nous offrent des témoignages de personnes ayant quitté le confort de leur maison pour vivre dans leur « maison roulante ». Christel Jackson dans le journal l’Age de faire (doc 9)  nous informe des lois qui restreignent ce mode de vie.

           Ainsi ce choix découlerait de raisons diverses, mais cette façon de vivre différemment a quelques limites…

Personnes privées de logement ou de confort – Source INSEE
En 2006, 85000 personnes vivaient dans des habitats de fortune (caravane, roulotte, camion…)

 

Les raisons de leur Nomadisme

 

           Ils étaient déjà 85000 en France en 2006 (source INSEE voir tableau) à avoir choisi (ou non d’ailleurs !) ce mode de vie alternatif. Plutôt que de vivre entre quatre murs, ils ont tous choisi la route. Qui sont-ils, et pourquoi ont-ils fait ce choix ?

           Le nouveau nomade, aussi appelé routard, est l’héritier de la génération « Beatnik ». Comme l’évoque F. Michel, il revendique la « liberté d’errer comme bon lui semble ».  Le routard fut d’abord un « errant en quête de survie » mais peu à peu le coté libertaire a pris le dessus sur la misère. Issu des mouvements de la contre-culture il est réfractaire à une société et un ordre social dont il est souvent exclu. En quête de liberté, il « prend le large pour mieux rompre avec le monde ». Comme en parle M.Frediani, certains évoquent une vie plus simple, plus saine, le retour à la nature. Ces nouveaux nomades n’éprouvent généralement pas le besoin d’avoir beaucoup d’argent, juste le nécessaire pour vivre. Le besoin d’autonomie et de quitter la routine sont des facteurs majeurs de ce choix. Ils partent à la recherche d’une vision différente de la vie. Certains voient ça comme une passade, un moment pour découvrir, apprendre.

           Un autre cas : les surfeurs. Ils parcourent le globe « au grès des saisons et de la qualité des vagues » déclare A.Christophe, car « la vague n’a pas de domicile fixe, eux non plus ». Ils ont donc choisi de vivre leur passion à fond. Ils voient le fait de vivre en camion ou en tente comme une « communion avec la mer, la nature ». S’ils étaient à l’hôtel ou dans une maison ils perdraient ce contact.

           Ce choix du nomadisme est aussi souvent lié à une situation de précarité. Le travail se faisant aujourd’hui de plus en plus rare ou précaire, si l’argent gagné ne peut couvrir que le loyer et l’électricité, ou s’ils sont expulsés de leur logement, ils sont parfois obligés de choisir cet habitat de fortune pour survivre, pouvoir manger et nourrir leurs enfants. On les appelle les half-homeless (les semi-sdf).

Pépinoyotte, la roulotte de l’éducation à l’environnement

Comment vivent-ils ?

           Il y a plusieurs catégories de nouveaux nomades : ceux qui choisissent de l’être et ceux qui le deviennent par obligation.

           Ces personnes vivent soit dans des habitats mobiles (caravanes, roulottes, camions aménagés, voitures, ou même en tente) soit dans des habitats éphémères (yourtes, tipis, cabanes) qu’ils installeront à un endroit et pourront déplacer quand le besoin de partir se fera ressentir.

           Ceux qui ont choisi ce mode de vie parcourent le monde au gré de leurs envies, certains choisissent le stop pour se déplacer, ils découvrent ainsi le monde sous un autre horizon, loin de la vie quotidienne que tout le monde connait, explique Gabrielle Culand, reportrice. Leur camion (ou autre habitat) est comme une grosse valise, leur lieu de vie c’est la planète. Ils vivent généralement au jour le jour, leur doctrine c’est le « do it yourself » (fais le toi-même). Ils apprennent donc à se débrouiller, ils aménagent généralement eux même leur habitat, certains font les poubelles pour se nourrir, pas seulement par manque d’argent, mais aussi par esprit de récupération. Ils veulent vivre d’une façon dont on a le moins besoin d’argent possible pour fuir cette société de consommation.

           Mais eux aussi ont besoin de gagner de l’argent pour pouvoir payer le strict minimum soit  la nourriture, l’essence et les vêtements entre autre. Ils vivent donc de petits boulots saisonniers, ce qui les oblige à changer souvent d’itinéraire. Ils se déplacent en fonction du bouche à oreille pour trouver ces jobs (c’est les saisons touristiques qui font l’essentiel des emplois).

           Christophe Agnus parle de surfeurs qui ont voulu vivre leur passion à fond, qui vivent de vagues toute l’année et ce déplacent par rapport à la mer et ses marées. Il est donc pour eux impossible d’exercer un boulot régulier. Leur moyen de gagner de l’argent est souvent le surf en participant à des compétitions, ou les emplois saisonniers.

           Ceux qui ont étés obligés de vivre ainsi, eux ont souvent une vie de famille, des enfants qui vont à l’école, leur besoin d’argent est donc plus élevé mais ne peuvent pas sillonner les routes en quête de travail. Ils vivent dans des situations précaires (toute une famille dans un camping-car ou une caravane) mais ils doivent continuer à vivre malgré tout.

Halfway-house par Joseph Robertson

Les problèmes rencontrés

           Tous ces nouveaux nomades ont une difficulté essentielle, pouvoir garer leurs maisons à roulettes. En effet, la plupart du temps les parkings sont interdits la nuit, pour tous les véhicules s’apparentant à des camping-cars, pour empêcher l’installation de groupes de nomades. Les parkings autorisés réservés à ce type de véhicules sont généralement payants, s’ils paient chaque jour, cela revient cher et s’apparente presque à un loyer…

           Dans «  les histoires qui font l’actu », ils montrent que dans certains pays, notamment aux Etats Unis, on construit  des parkings car il y a une progression  importante de cette population, principalement due à la crise économique. L’inconvénient de ces parkings est qu’il faut  en partir tôt le matin pour éviter que les touristes ne voient  cette population de semi-sdf , contraire à une image touristique forte. Ils ne savent donc pas s’ils auront de la place le soir, pour se garer de nouveau en semi sécurité.

           La deuxième difficulté est le froid. En effet que ce soit choisi ou non, les nouveaux nomades ne peuvent pas se réchauffer comme ils le veulent, surtout en hiver quand les températures sont en dessous de 0°c. Ils ne peuvent pas faire tourner le moteur de leurs maisons à roulettes toute la nuit pour avoir le chauffage, ou utiliser un chauffage d’appoint avec les risques connus de gaz intoxicants,  au bout d’un moment ils subissent donc le froid.

           Un autre point négatif important concerne uniquement  ceux qui ne l’ont pas choisi, c’est la honte. La honte de ne pas avoir de logement et d’être contraint de vivre dans une voiture. La honte de ne pas pouvoir bien s’occuper de sa famille et la peur que quelqu’un découvre leur secret et leur enlève leurs enfants.

           Concernant les habitats éphémères certaines lois réduisent les droits de ce mode de vie. La construction d’une yourte ou d’une cabane au-delà de 35 m² nécessite un permis de construire. Comme on le voit dans l’article de l’âge de faire, « le non raccordement aux réseaux les apparente à des logements insalubres ». S’il n’y a pas de sanitaires, les yourtes et tipis sont comme des tentes, on peut donc pratiquer ce type de camping n’importe où. Mais les maires peuvent « exiger que l’on démonte l’habitat » s’il porte atteinte à la salubrité (car les techniques d’épuration naturelles ne sont pas reconnues), ou à la tranquillité publique.  En revanche s’il y a des blocs de sanitaires, ce sont des habitations de loisirs, elles doivent donc être placées dans un camping…

 

 

           Ils sont nombreux à avoir quitté le confort d’une maison pour vivre sur les routes. La fin de l’emploi à vie et la précarité imposent certes une plus grande mobilité, mais le nomadisme est bien souvent choisi, le besoin d’autonomie, de liberté, de quitter la routine, de découvrir le monde, les gens,…  sont les choses importantes qui ont poussé tant de personnes à faire ce choix. Mais pour cela il faut abandonner son confort, et essayer de vivre simplement, car trouver du travail reste une chose difficile…

Marine Maurel et Delphine Bloyet

Bibliographie