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Travail en mutation

L’environnement : imprévu dans le monde du travail

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diana_buc, pollution, Flickr

De nos jours, avec le réchauffement climatique qui urge, le réveil de la conscience écologique, et la perte de sens au travail, beaucoup se demandent à quoi servent ces 35 heures par semaine, et si elles ne sont pas nocives pour l’environnement. D’un autre côté, la transition écologique offre toujours plus d’emplois dans l’environnement, dans un monde taillé pour les industries polluantes. La cohabitation ne pourra pas durer encore bien longtemps. Comment changer la société pour laisser se développer ces fameux métiers verts ?

En 2019, 0.5% des métiers étaient verts et 14 % étaient dits « verdissants »1, c’est à dire qui touchent l’environnement mais pas dans l’immédiat. Certains diront que ce n’est pas assez, d’autres, que c’est déjà plus que ce à quoi ils pensaient, mais le problème reste le même : ces métiers évoluent dans un monde qui n’est pas fait pour eux, ce qui ralentit considérablement leur montée. Pour la favoriser, il faudrait changer nos modèles économique et social. Nous nous sommes donc penchés sur les raisons et solutions de ce changement nécessaire.


I – Des métiers en vogue

Avec la montée des crises climatique, économique, financière, et alimentaire, les métiers verts semblent être une solution adéquate à chacune. Recruter dans certains domaines comme l’agriculture biologique remplirait les quatre conditions.

De plus, le réchauffement climatique est en marche depuis longtemps, et les multiples campagnes de sensibilisations et l’action quasi permanente de la tirette d’alarme par les médias ont rendu ce sujet important aux yeux des jeunes. En effet, certains lycéens et étudiants disent préférer un métier plus respectueux de l’environnement ou qui le protège, tel qu’ingénieur dans l’environnement, quitte à être moins rémunérés2.

Au vu de toutes ces raisons, il n’est donc pas étonnant de constater que ce sont des métiers qui recrutent et qui recruteront de plus en plus, l’OCDE prévoyant pour 2030 une création de 20 millions d’emplois dans le monde. Ce recrutement massif leur fera donc prendre de plus en plus de place dans l’économie, autant française que mondiale.

II – Le monde du travail en mouvement

L’économie française verra de plus en plus de métiers verts. Pour ce faire, il va falloir qu’ils prennent la place des métiers plus polluants. Il y aura donc nécessairement « création destructrice » d’emplois, pour reprendre l’expression de Schumpeter, un éminent sociologue du XIXe siècle. Les 50 sites industriels les plus polluants n’emploient que 30 000 personnes, soit à peine 1,12 % des employés français en 20223 . De son côté, l’Ademe affirme que 540 000 emplois seront créés en France d’ici 2030. En plus de dépasser les industries polluantes sur le marché du travail, les métiers verts pourraient parfaitement absorber le licenciement massif que provoquerait la destruction de ces emplois polluants.

Mais il ne faut pas oublier les métiers qui se « verdissent », qui effectuent une transition. En effet, certains métiers vont être transférés d’un secteur à l’autre, et les travailleurs vont devoir se reconvertir. Beaucoup d’employés risquent de se retrouver dans ce cas, et, d’après Liza Baghioni, sociologue et anthropologue du travail au Céreq, un des enjeux de ce glissement vers des métiers verts va être la reconversion. D’autres pourraient modifier leur façon de travailler pour devenir plus écologiquement viable. L’agriculture intensive, par exemple, pourrait, si elle changeait ses pratiques, créer beaucoup de métiers en plus d’être plus respectueuse de l’environnement. C’est l’exemple que nous donnent les maraîchers qui engendrent de nombreux emplois saisonniers, et la grande majorité produit des produits bio.

III – Un accompagnement nécessaire

Comme nous vous l’avons laissé comprendre, la montée des métiers verts dans l’économie va provoquer des changements au niveau économique et social non négligeables tels que ceux cités plus haut. « Cela suppose de repenser la gouvernance des politiques et des projets aux différents niveaux, européens, nationaux et régionaux » (Philippe Gouin et Patrick Roturier, 2015). Il faudrait activer tous les leviers des états pour favoriser ce développement. « Il y a urgence » affirme Liza Baghioni.

Cependant, cela ne semble pas être le cas. En effet, le verdissement des diplômes est timide, leurs rénovations étant trop lentes pour suivre l’attendu des entreprises et du monde du travail, les subventions envers les PME ou TPE encore trop justes, ou pas assez conséquentes pour contrecarrer les multiples accusations envers l’Etat, affirmant qu’il cajole les industries polluantes ; autant de signes qui montrent que ce fait de société n’est pas la priorité des Etats.


Le monde du travail bouge, et en faveur de l’environnement. Il va s’imposer de plus en plus, face aux entreprises polluantes. Mais de nombreuses études montrent que la balance finira par pencher en faveur des métiers verts. Au vu du désintéressement de la part des Etats, le changement risque d’être brutal. Il est temps de choisir son camp.

Clément Jeambrun et Blandine Mataillet.

  1. Métiers verts et verdissants : près de 4 millions de professionnels en 2019 [en ligne]. Ministères de l’aménagement du territoire et de la transition écologique, 13 septembre 2019 [ consulté le 11 février 2025]. Disponible sur : https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/metiers-verts-et-verdissants-pres-de-4-millions-de-professionnels-en-2019#:~:text=%C3%A9lev%C3%A9%20d’ouvriers.-,L’emploi%20dans%20les%20m%C3%A9tiers%20verts,%25%20de%20l’emploi%20total. ↩︎
  2. Le Coustumer, Pierre. Gagner moins mais travailler vert. La Nouvelle République [en ligne], mercredi 13 décembre 2023 [consulté le 3 février 2025]. Disponible sur : https://www.lanouvellerepublique.fr/blois/loir-et-cher-ces-jeunes-prets-a-gagner-moins-pour-travailler-vert ↩︎
  3. Meslet, Emilio. Transition écologique : Macron cajole les industries polluantes. L’Humanité [en ligne],  8 novembre 2022 [consulté le 12 février 2025]. Disponible sur : https://www.humanite.fr/societe/industrie/transition-ecologique-macron-cajole-les-industries-polluantes ↩︎

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Thème culturel et socio-économique 2023-2026 : Le travail en mutation

Le travail est-il en crise depuis celle du Covid-19 ? A-t-il perdu tout sens pour les nouvelles générations ? Quelle place lui donner dans sa vie ? Dans la société ? Dans la transition écologique ? Que changent les nouvelles formes de travail ? Le télétravail, l’auto-entreprenariat ?

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Partir étudier à l’étranger

Photo par Willamor Media sur Flickr

De nos jours, les études à l’étranger font partie des nombreux flux migratoires et sont assez importantes. En effet, les études supérieures sont de plus en plus nécessaires, et pas suffisamment accessibles dans tous les pays ; globalement dans les pays africains, des milliers d’étudiants n’ont pas possibilité de continuer des études supérieures. On peut donc se poser la question suivante : Partir étudier en France, pour un Africain : une opportunité accessible à tous ? Dans une première partie, nous verrons les difficultés des étudiants africains sur leur terre et les facteurs d’attrait français, puis dans une seconde nous verrons les relations France-Afrique, et enfin dans une dernière les difficultés d’accès aux études en France. Pour ce faire, nous nous appuierons sur de nombreux documents, comme une enquête menée par l’Observatoire National de la Vie Etudiante (écrite par Ridha ENNAFAA et  Saeed PAIVANDI), ou encore d’un mémoire écrit par Aline MANDRILLY et bien d’autres.

Les difficultés en terre africaine et les facteurs d’attrait français :

C’est à travers un exemple représentatif des conditions d’études en Afrique que l’on comprend les difficultés rencontrées dans leur pays par les étudiants africains. En effet, comme en témoigne l’étudiant de Dakar Alou DIAWARA dans france24, même en étudiant dans l’une des meilleures universités d’Afrique, il explique les conditions difficiles et surtout les problèmes d’hébergement et de nourriture qu’il rencontre.

D’autres grandes difficultés viennent s’ajouter à celle-ci, notamment celle du sureffectif, en effet il arrive souvent qu’une université accueille plus du double d’étudiants que le nombre pour laquelle elle a été conçue. De plus, l’encadrement est insuffisant et le matériel pédagogique pratiquement inexistant, car l’argent manque pour alimenter les bibliothèques universitaires, et le prix des livres est trop important pour que les étudiants les achètent eux-mêmes. C’est donc le manque de moyens, principalement financiers, qui explique les mauvaises conditions d’études en Afrique et l’envie des étudiants de partir étudier où les conditions sont meilleures.

 Les Africains sont attirés par la France de par de nombreuses formations de qualité à prix modéré et réparties sur tout le territoire, qui leur permette de compléter leur études entreprises dans leur pays, mais également par la qualité de la vie, ainsi que le rayonnement culturel de ce territoire. L’enquête d’OVE Info permet d’ajouter d’autres facteurs attraits français qui sont l’apprentissage de la langue française, un intérêt culturel, c’est-à-dire développer ses connaissances sur le pays, mais aussi pour la valeur des diplômes français. Sur l’aspect financier, la France a l’un des plus faibles coups d’inscription à une université d’Europe.

Relation France-Afrique.

La relation entre la France et l’Afrique, surtout avec ses anciennes colonies, est marquée par trois grandes phases d’immigration des étudiants africains en France :

Tout d’abord de 1971 à 1984, lorsque les anciennes colonies françaises deviennent indépendantes, la France  ouvre ses frontières aux élites africaines, les étudiants originaires des anciennes colonies arrivent en masse. La France maintient ainsi son influence culturelle sur les étudiants des pays émergents et elle montre aussi aux autres pays les valeurs de sa générosité et de se fraternité pour les peuples qu’elle prétendait défendre.    Ensuite de 1985 à 1987, l’essor des migrations intra-européennes fait régresser l’immigration étudiante africaine. Enfin depuis 1987, l’immigration africaine s’est stabilisée, et contrairement aux années précédant 1980 où seule l’élite intellectuelle des pays migrait pour effectuer ses études en France, les étudiants sont maintenant d’origines sociales très diverses ; on assiste donc à un accès aux études en France moins sélectif quant à l’origine sociale de l’étudiant.

Aujourd’hui les étudiants africains sont très majoritaires ; en effet jusqu’en 2003-2004, plus de la moitié des étudiants étrangers inscrits dans les universités françaises sont originaires des pays francophones d’Afrique, et principalement du Maroc et de l’Algérie (un étudiant sur quatre est Marocain ou Algérien). Le nombre d’étudiants africains a augmenté de 73% entre 1998 et 2003.  Jusqu’en 2004, les étudiants africains étaient majoritaires parmi les étudiants étrangers en France ; cela s’explique par les liens historiques, la langue, l’existence en France d’une communauté en provenance de l’Afrique, et par les bourses. Mais cette croissance s’est réduite de deux tiers en 2004. C’est désormais les étudiants d’Asie qui sont les plus nombreux à venir en France. La croissance des étudiants africains diminue, la sélection est de plus en plus importante à travers le talent et les compétences.

Pour venir en France, les étudiants africains passent par le biais de programmes d’échanges entre les deux pays, comme Erasmus, Leonardo, Erasmus Mondus, CampusFrance etc. De plus, les bourses qui permettent très souvent aux étudiants africains de venir étudier en France proviennent principalement de l’Afrique, ou de la France, ou des deux pays ; très peu sont données directement par les universités ou les fondations privées. Les principales bourses sont les bourses des ambassades de France à l’étranger, les bourses d’études supérieures de la fondation Bouyguesles bourses d’études en théologie, les programmes de bourses cofinancées Quai d’Orsay/ Entreprises, les bourses du CNRS (Centre national de la Recherche Scientifique), les bourses de l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) et enfin les bourses d’excellence Eiffel ;  mais toutes ces bourses sont accessibles à certaines conditions.

Les difficultés d’accès aux études en France.

L’étudiant africain ne peut pas aller en France du jour au lendemain ; il va devoir faire face à un parcours administratif long et compliqué. En effet comme l’explique parfaitement Aline MANDRILLY dans Les Etudiants Africains en France : « Avant même de déposer un dossier de candidature pour l’inscription dans une université française il est imposé aux étudiants étrangers venant d’un pays non francophone, ou n’ayant pas étudié dans un lycée français, de passer (et de réussir) un test linguistique de connaissance de la langue française, et parfois même un test académique d’évaluation des connaissances, malgré la présentation d’un diplôme. Si ces deux tests sont passés avec succès, l’étudiant peut monter son dossier de candidature et l’envoyer, le plus souvent par le biais d’un organisme habilité, aux différentes universités demandées, qui sélectionnent ensuite les dossiers. Depuis la Loi CESEDA, les critères sont plus difficiles à réunir (moyenne plus élevée au baccalauréat, conditions de ressources, projet professionnel…) et les quotas d’étudiants étrangers ne sont plus les mêmes en fonction des filières. Ils auront plus de chance de s’inscrire dans une filière peu demandée par les étudiants français (Lettres, Arts…), alors qu’en Sciences ou en Economie, les places sont de plus en plus verrouillées».

Quand l’étudiant a été accepté, il doit obtenir un visa long séjour avec mention étudiant. Pour obtenir celui-ci, il faut encore fournir de nombreux documents : un passeport valide que l’étudiant va devoir payer ; une garantie de domicile, qu’il ne peut fournir que s’il connaît déjà quelqu’un sur place qui peut le loger ; la pré-inscription à l’université, qui peut être délicate lorsque la filière offre peu de places ; et une attestation bancaire qui prouve que l’étudiant disposera de minimum 430 € par mois durant son séjour en France. Si l’étudiant réussit à réunir tous ces papiers administratifs, il faut encore qu’il puisse assurer le paiement de son visa.

Parmi ces nombreuses étapes, deux sont difficiles à franchir. La première est celle de l’ouverture d’un compte en banque. En effet, l’étudiant peut être confronté à une discrimination indirecte c’est-à-dire que la banque refuse l’ouverture d’un compte en banque sous prétexte que l’étudiant n’a pas assez d’argent pour le remplir ; ou encore une mauvaise volonté des banques qui ne veulent ouvrir un compte que sur présentation d’une carte de séjour, alors que cette carte n’est délivrée que sur présentation d’un relevé d’identité bancaire. De plus, l’étudiant ne connaissant pas beaucoup le système législatif français, ou ne maîtrisant encore parfaitement la langue française, ne comprend pas correctement le premier entretien avec le banquier. Enfin l’obtention des moyens de paiement est généralement longue et cela empêche les étudiants étrangers de payer leur inscription à l’université ou la caution pour leur logement. La deuxième étape difficile est l’inscription universitaire. En effet les termes utilisés dans ces dossiers sont parfois déjà bien difficiles à comprendre pour un Français, et représentent alors un réel obstacle pour un étudiant étranger. Les dossiers ne sont pas adaptés à l’origine étrangère des étudiants. De plus, les étudiants étrangers sont reçus comme des étudiants français, il n’y a pas d’accueil spécifique. En matière de santé, les étudiants de nationalité étrangère bénéficient de la sécurité sociale étudiante, mais ils ne sont pas informés de certaines modalités qui leurs permettraient par exemple de ne pas payer la sécurité sociale (cotisation salariales), ou encore des conditions et démarches nécessaires pour l’accès à une mutuelle gratuite (CMU).

Une fois en France, après ce parcours administratif long et difficile, l’étudiant africain a encore un souci, celui de la carte de séjour. Elle n’est valable qu’un an et doit obligatoirement être renouvelée avant sa date d’expiration. Son renouvellement dépend de la progression dans les études de la part de l’étudiant africain, c’est-à-dire que de façon générale il ne doit pas redoubler une année. Des justificatifs sont demandés à l’occasion de chaque renouvellement (relevé de notes des derniers examens passés). Le renouvellement de la bourse dépend des mêmes critères pour les étudiants étrangers. Si ces critères ne sont pas respectés, la reconduite à la frontière est généralement la seule issue. De plus, la France a des faiblesses structurelles, les étudiants africains rencontrent des difficultés pour s’insérer et se loger et peuvent parfois être déçus par le peu de débouchés professionnels à la fin de leur formation en France. Comme le montre Adrien DE CALAN dans Slate Afrique, seulement 64 % des étudiants originaires d’Afrique interrogés trouvent que leur séjour en France a favorisé leur insertion professionnelle. L’aspect financier rend difficile la vie en France. En effet les étudiants africains sont obligés de travailler pour vivre. C’est donc de part un parcours long et compliqué , mais surtout avec beaucoup d’envie et de motivation que l’étudiant africain pourra aboutir à son « rêve ».

 

 

 

Pour conclure, l’accès aux études en France pour tous les Africains est possible mais à certaines conditions. De nombreux facteurs motivent les étudiants africains à quitter leur pays et choisir la France ; en effet, les mauvaises conditions d’études les poussent à venir étudier sur le territoire français qui est une bonne terre d’accueil, avec de nombreuses formations de qualité. De plus, la relation France-Afrique favorise leur venue de par les aides financières et les programmes d’échanges. Toutefois, il existe des facteurs restrictifs comme la difficulté de constituer le dossier de candidature, d’obtenir des bourses, de s’insérer, et des moyens financiers trop faibles.

« Si tu n’as pas voyagé, étudie » Proverbe camerounais ; Le Cameroun en proverbe, 1909.

CABERLON  Alexandre

POLYDAMAS Andy

Bibliographie :